Place des femmes dans la recherche universitaire.

Question écrite N° : 9 214 de Madame Marie-Ange Magne ( La République en Marche – Haute-Vienne )

Ministère interrogé : Enseignement supérieur, recherche et innovation

Ministère attributaire : Enseignement supérieur, recherche et innovation

Titre : Place des femmes dans la recherche universitaire.

Question publiée au JO le : 12/06/2018 page : 4922

Réponse publiée au JO le : 21/05/2019 page : 4750

 

Texte de la question :

Mme Marie-Ange Magne interroge Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, sur la question de la place des femmes dans la recherche universitaire. Promu à l’article premier de la Constitution, le principe d’égalité femmes-hommes concernant l’accès aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales constitue un pilier de la démocratie française. En France, en 2016, les femmes représentent 45% des effectifs de doctorants de première année. Pourtant, la même année, elles ne constituent que 42 % des doctorants rémunérés, 35 % des ingénieurs de recherche, 14 % des chercheurs en entreprise dans le domaine des mathématiques et conception de logiciel, 40 % des chercheurs de niveau « maître de conférences », 20 % des chercheurs de niveau « professeur des universités » et seulement 12 % des présidents d’université. En outre, trois ans après l’obtention d’un doctorat, les conditions d’emploi des femmes sont systématiquement moins favorables que celles des hommes. Ces statistiques éloquentes montrent qu’il existe une réelle fracture dans le monde de l’enseignement supérieur et de la recherche. Si la tendance est à l’effacement des inégalités, il n’en demeure pas moins qu’il faudra attendre 2068 pour obtenir une parité complète dans le corps des professeurs d’université. Et quand bien même les chiffres illustrent une montée de la féminisation de disciplines traditionnellement masculines ou encore une augmentation de la participation des femmes dans la recherche, ces avancées ne permettent pas de déduire que les femmes bénéficient, au même titre que les hommes, d’un même accès au système de science ou d’une marge de progression semblable dans leur carrière scientifique. Il existe de nombreuses barrières sociales et institutionnelles qui freinent l’installation des femmes dans l’enseignement supérieur et dans la recherche. Des travaux de sociologues mettent en avant les charges de travail invisibles qui empêchent les femmes d’avancer dans leur thèse, la prédominance du style de travail compétitif et individualiste ou encore l’accès privilégié des hommes aux postes de pouvoir. Ils s’accordent à dire qu’il est plus difficile pour les femmes de trouver un équilibre entre les contraintes académiques et les responsabilités familiales. La parité dans le monde de l’enseignement supérieur et de la recherche est encore loin d’être atteinte. Les avancées en la matière ne doivent pas faire oublier l’ampleur des progrès à réaliser. Face à ce constat, elle lui demande quelles mesures d’accompagnement sont prévues en faveur de l’insertion des femmes dans le domaine de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.

Texte de la réponse

L’action du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI) pour promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’enseignement supérieur et la recherche se traduit d’une part, par la mise en place d’un cadre juridique adapté, avec notamment : – La loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations, pose le principe d’une proportion minimale de 40 % de chaque sexe dans les jurys de recrutement ou les comités de sélection. Cette loi a permis une composition plus paritaire des jurys. – La loi    n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, prévoit une série de mesures en faveur de la parité, notamment l’obligation de statistiques sexuées, la parité dans la plupart des instances de gouvernances (notamment parité dans les conseils d’administration des universités). – Ces lois sont également accompagnées par une politique interministérielle très active avec notamment, le protocole d’accord pour l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans la fonction publique, de 2013 [1] et plus largement, concernant tous les secteurs, le plan interministériel en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes 2016-2020 [2] et ses déclinaisons sectorielles (plan pour l’égalité professionnelle dans le travail social, dans les transports, dans le numérique). D’autre part, l’action du MESRI se concrétise par la mise à disposition d’outils et notamment, le rapport de situation comparée relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes du ministère, publié annuellement depuis 2016. Véritable outil d’analyse prospective appelé à être décliné dans les établissements d’enseignement supérieur, il sera enrichi chaque année afin de permettre d’analyser de manière plus précise, sous l’angle exclusif de l’égalité femmes-hommes, la situation des personnels du ministère et de mettre en œuvre les mesures correctrices adaptées aux besoins identifiés. Ces outils statistiques permettent ainsi de constater que même si l’augmentation de la part des femmes dans l’enseignement supérieur et la recherche est notable au cours des dernières années, un déséquilibre sexué perdure toujours. Au fur et à mesure que l’on s’élève dans la hiérarchie des postes universitaires/de recherche, la proportion de femmes diminue. Ce que l’on constate au niveau national est comparable aux proportions constatées au niveau européen [3]. A la lumière de ces constats, un groupe de travail dédié aux freins aux carrières des femmes chercheures et enseignantes-chercheures au sein de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) a été mis en place par le ministère en 2017. Ce groupe de travail composé de représentants des services du MESRI ainsi que des représentants des principaux acteurs de l’ESR (conférences des chefs d’établissements, conférence permanente du conseil national des universités, Agence nationale de la recherche, Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, organismes de recherche) s’est, d’une part, donné pour objectif de rappeler les principaux constats et pistes d’explication, liées notamment à l’articulation vie professionnelle-vie privée/familiale, aux critères ou modalités de sélection (recrutements et promotions), ainsi qu’à des logiques plus structurelles qui existent au sein de l’ESR, en partie liées aux représentations genrées. Il a, d’autre part, eu pour objet d’identifier les bonnes pratiques en matière d’égalité professionnelle, en France et à l’étranger, susceptibles d’être généralisées au sein des opérateurs de l’ESR. A l’issue de ces phases de recensement de bonnes pratiques et d’échanges qui se sont déroulées jusqu’au début de l’année 2018, un rapport intégrant les contributions des différents membres du groupe a été rédigé. Ce dernier présente un état des lieux et les principales pistes explicatives des inégalités de carrière, et propose des mesures et recommandations qui apparaissent les plus efficaces et les plus adaptées à une mise en œuvre au sein de l’ESR français. Les recommandations ont été structurées en quatre grands axes d’actions :

  1. remédier aux biais de sélection qui peuvent intervenir lors des recrutements ou promotions ;
  2. garantir une articulation satisfaisante entre la vie professionnelle et la vie privée ;
  3. renforcer le développement et l’évaluation des politiques d’égalité au sein des opérateurs de l’ESR ;
  4. inciter à la prise en compte de l’égalité femmes/hommes lors du financement des projets de recherche.

Pour chacun des axes, le rapport de synthèse a distingué les mesures phares jugées prioritaires à mettre en place, les bonnes pratiques à diffuser et les pistes complémentaires d’actions à creuser à plus long terme. Ces recommandations, notamment les mesures phares, sont actuellement discutées avec les organisations représentantes des personnels et les conférences des chefs d’établissement afin de choisir les actions prioritaires à mettre en œuvre pour 2019. Parmi les propositions avancées par la ministre figure la création d’un contingent de congé spécifique [4] au retour d’un congé de maternité ou d’un congé parental, par exemple pour préparer une habilitation à diriger des recherches.

[1] https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/publications/politiques_emploi_public/20130308-Protocole-d-accord-egalite-professionnelle.pdf

[2] https://www.egalite- femmes-hommes.gouv.fr/wp-content/uploads/2017/04/Plan-interministeriel-en-faveur-de-l’Egalite-professionnelle-entre-les-femmes-et-les-hommes-PIEP-revu13042017.pdf

[3] Commission européenne, 2015, She Figures, voir par exemple Figure 6.1, et Tableau 6.1, p. 127 et 129

[4] Exemple : congé pour recherche et conversion thématique.

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